Conférence sur le sol vivant - Marc-André SELOSSE

Conférence sur le sol vivant par Marc-André SELOSSE, Professeur au Muséum National d’Histoire Naturelle

LE SOL EST LE PLACENTA DE L’HUMANITÉ

La gestion et la compréhension des sols est au carrefour d’enjeux économique, géostratégique, politique, écologique et climatique. C’est le propos – passionnant – du chercheur Marc-André Selosse.

Des livres, des vidéos, et même une BD(1). Marc-André Selosse ne compte plus les heures qu’il passe à transmettre ce qu’il sait de la gestion des sols et de son importance dans le phénomène de réchauffement climatique. Ce biologiste, spécialiste des champignons, enseignant-chercheur rattaché au Muséum d’histoire naturelle de Paris sera le 13 avril en conférence en Charente, dans le cadre des animations 2023 du label Villes et Villages Fleuris, partie intégrante cette année de la Fête de l’Arbre et de la Nature (lire par ailleurs). « Mais le propos de Marc-André Selosse va bien au-delà du label, cela concerne tout le monde », souligne Marie-Cécile Bernard, animatrice départementale du label Villes et Villages Fleuris. Entretien avec un vulgarisateur hors pair, en forme de prélude à une conférence ouverte à tous.

Comment vous est venu cet intérêt pour ce qui se passe sous nos pieds ?

À l’origine, je suis mycologue, je m’intéresse aux champignons depuis que je suis tout gamin. Plus tard, je suis devenu chercheur, puis enseignant-chercheur. Les champignons, objets de mes recherches, appartiennent à la fois au monde microbien et à celui du sol. Donc je me suis intéressé au sol parce que je m’intéressais au champignon, et cet intérêt est ensuite devenu plus global, plus sociétal car le sol concerne tout le monde.

Pourquoi le sol est-il si important ?

Le sol, c’est ce qui fait le climat, le cycle de l’eau, la fertilité des océans, notre alimentation. Le sol est le placenta de l’humanité : il nous nourrit, et en même temps, vous avez remarqué que personne n’a jamais vu son placenta. L’humanité ne réalise pas tout ce que fait le sol. Or, quand on néglige cet aspect, alors cela devient un problème : une partie des émissions de gaz à effet de serre provient aujourd’hui du sol, alors qu’une meilleure gestion des sols pourrait permettre de les compenser!

Quelles sont les menaces qui dégradent les sols ?

Les algues vertes, les algues brunes, l’érosion… sont les résultats d’une mauvaise gestion des sols, alors qu’il y a des formes d’agriculture qui les gèrent mieux. Le labour augmente l’érosion d’un facteur 10 : le sol produit plus, certes, mais il disparaît. Les sols de la Beauce s’érodent aussi vite que les sols alpins ! Le labour déstabilise la vie contenue dans les sols ainsi que leur structure et il détruit la matière organique du sol. Aujourd’hui, des formes d’agriculture non labourée permettent d’éviter ces problèmes. Autre exemple de menace : les engrais minéraux. Certes les plantes poussent mieux, mais une partie de ces engrais part dans l’eau et cela entraîne les marées vertes en mer. Dernier exemple : l’artificialisation des sols. En 50 ans, on a perdu 10 % de notre surface agricole, l’équivalent de la région PACA, disparue sous les infrastructures de transport, les zones industrielles, les banlieues pavillonnaires... On ne peut pas continuer, parce qu’il en va de notre autonomie alimentaire. Derrière cette artificialisation des sols, se cache, à terme, un risque géopolitique : le refus de certains pays producteurs de nous exporter de la nourriture. Aménagez une plateforme logistique, et vous retirez l’alimentation de la bouche de vos enfants !

Quelles solutions entrevoyez-vous ?

Ce n’est pas un problème technique, ce n’est pas un problème agricole, ce n’est pas un problème de spécialiste : la solution proviendra du changement de notre façon à tous de consommer. Elle viendra jouer sur les modalités de production et encouragera des pratiques plus respectueuses. Pour cela, il faut que les citoyens comprennent ce qu’il se passe réellement dans les sols puis consomment et votent d’une façon cohérente avec ce qu’ils sauront. Souvent les gens disent « je ne suis pas bon en science », mais ce n’est pas vrai, c’est juste qu’on leur explique mal et qu’ils se censurent ! Les gens ne sont pas idiots du tout. 

Vous intervenez dans le cadre d’une animation autour du label Villes et villages fleuris 2023. La végétalisation des espaces urbains peut-elle venir contribuer à une meilleure qualité de nos sols ?

Tout dépend comment l’on s’y prend. Si c’est seulement mettre des vasques avec des fleurs, vous n’aurez pas géré le sol. La végétalisation est en revanche un très bon angle pour aller vers le sol. Mais il ne s’agit pas de rester au bord du problème : il faut gérer véritablement le sol et aller vers l’action écologique. La végétation en ville est une solution par rapport à l’écoulement des eaux, contre les inondations, pour la fraîcheur en été, pour la nourriture et la socialisation des habitants. Mais cela suppose un regard large et une compréhension globale de l’écologie cachée derrière ce genre de démarche, afin de rétablir les services écosystémiques des sols.

(1) L’Origine du monde : une histoire naturelle du sol à l’intention de ceux qui le piétinent (Actes Sud). BD : Sous Terre (Dargaud).

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